L'Europe ne se fera pas en un jour, mais certaines réformes, sur lesquelles une majorité européenne peut être trouvée, peuvent intervenir rapidement et positivement en réponse à la crise actuelle. Pour les écologistes, qui n'ont pas varié sur ce point depuis l'adoption du texte, le TSCG(traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance de l'Union économique et monétaire) est, comme seule réponse, un traité inadapté et facteur potentiel d'aggravation des troubles.
L'Europe telle qu'elle est menace de tuer
l'idée européenne elle-même
Ce
n'est pas seulement un ensemble d'institutions qui est fragilisé, mais le coeur
même de la construction
européenne, ce désir commun des peuples européens à parfaire leur union, qui
est touché.
Les écologistes, militants historiques d'une Europe
politique, fédérale et démocratique, au service de ses citoyens et de l'idéal
universel de coopération et de solidarité entre les peuples, ne peuvent être
qu'inquiets de cette plus grande fragilité de l'idée européenne.
Les
écologistes ne doivent pas cesser d'expliquer, dans le débat français comme
dans le débat européen, que la crise, désormais systémique, n'est pas seulement
une crise de la dépense, a fortiori publique, mais une crise des
recettes – amoindries par des choix fiscaux qui ont aggravé les inégalités – et
une crise des ressources – et en premier lieu des ressources énergétiques, dont
les coûts ne cesseront d'augmenter à mesure de l'épuisement de leurs stocks,
fragilisant encore un peu plus le modèle économique productiviste que les
dirigeants européens persistent à vouloir sauver.
Le
traité de stabilité, de cohérence et de gouvernance (TSCG)
Depuis
2009, l'Europe ne parvient pas à sortir de la crise. La Grèce a perdu 18% de sa
richesse nationale annuelle, l'Irlande 9%, le Portugal, 6,5%. A l'exception de
l'Allemagne, le chômage y a partout explosé. Et malgré des purges de plus en
plus sévères dans les budgets nationaux, les dettes et les lourds déficits
budgétaires sont toujours là.
L'objectif
premier du TSCG est, aux termes de son article 3, d'inscrire « une règle
d'équilibre budgétaire
au sommet de la hiérarchie des normes des États signataires et de l'assortir de mécanismes
contraignants d'application ». Cette obligation figure toujours dans le texte
du traité, qui n'a pas varié dans son contenu depuis son adoption, en mars
dernier, par les 25 États de l'Union qui l'ont approuvé. La ratification
conduirait donc la France à transposer dans sa législation nationale
l'obligation d'un « déficit structurel » annuel – c'est-à-dire corrigé des
effets de conjoncture économique, même si la définition reste imprécise –
inférieur à 0,5% du PIB.
En
d'autres termes, le TSCG assigne aux États, par des procédures de contrôle –
échappant du reste aux représentants élus par les citoyens européens –
d'obligations budgétaires drastiques, restreignant très défavorablement la
possibilité de politiques économiques contra-cycliques de relance. Le problème
que pose le TSCG n'est donc pas strictement d'ordre règlementaire ou juridique.
Il est, tout autant, économique et politique.
Le « pacte de croissance » et le
compromis de Bruxelles
En
premier lieu, le pacte dit « de croissance » ou plan d’investissement européen,
soutenu lors de la campagne présidentielle et depuis, par François Hollande.
Si ce
pacte demeure, à ce stade, très loin – quantitativement et qualitativement – de
ce qui serait nécessaire pour envisager un « New Green Deal », seule voie
crédible de sortie de crise, il constitue néanmoins une inflexion de la logique
exclusive d'austérité qui prévalait jusqu'ici. Au regard du rapport de forces
européen, où les gouvernements conservateurs sont très nettement majoritaires,
ce compromis peut être salué comme une avancée, sous cette condition du moins
qu'il permette d'en construire d'autres prochaines.
Les engagements
relatifs à la supervision bancaire et à la mise en place d'une taxe sur les
transactions financières (TFF) peuvent, eux aussi, être légitimement considérés
par les écologistes,
très actifs de longue date sur ces questions, comme des éléments positifs.
A
elles seules, ces avancées sont insuffisantes. L'inflexibilité constatée sur la
mutualisation des dettes publiques européennes et sur l'évolution des statuts
de la BCE ; le dimensionnement budgétaire très faible, et du reste encore
incertain, du pacte de croissance ; les critères d'activation très restrictifs
du FESF et du MES ; la persistance de mécaniques institutionnelles
intergouvernementales ; les difficultés à renforcer les ressources propres de
l'Union et, au surplus, l'absence à peu près totale de vision de ce que pourrait
être un modèle économique de développement soutenable pour l'Europe, tout cela
conduit à tempérer la portée des avancées obtenues.
A ce
stade, elles ne permettent pas de progrès significatif vers davantage
d’intégration fédérale européenne, davantage de solidarité et de démocratie
portées par les institutions européennes.
Elles
ne constituent pas, en l’état, une réponse valable et durable ni à la crise
d'un modèle économique
facteur de troubles et d'instabilité ni au déficit démocratique européen. L'Europe souffre
de ne pas s’être dotée de structures de solidarité fortes et, ajoutons-nous
comme écologistes,
fédérales et démocratiquement contrôlées.
La seule certitude tient à ce que les principes du TSCG,
dont on peut s'interroger sur l'applicabilité, imposerait aux États membres de
la zone euro une rigueur drastique sans vision d’avenir.
Au
delà du TSCG, les écologistes travaillent à faire progresser une Europe
fédérale.
Les
écologistes s'attachent à porter pour l'Europe les réformes suivantes :
−
Renforcer la solidarité
Les
interventions récentes de la Banque centrale européenne ne peuvent se
substituer à la responsabilité des États. Les euro-obligations, pour mutualiser
les dettes nationales et contrer les marchés, sont indispensables. La solidarité
doit aussi trouver une déclinaison beaucoup plus sociale. En plus des fonds
structurels, nous soutenons la proposition de créer rapidement un fonds
européen d’assurance chômage qui permette d’intervenir en urgence dans des pays
où, comme en Grèce aujourd’hui, les citoyens sont confrontés à la disparition
de tout modèle social ;
−
Engager la transition écologique de l’économie
L’Europe
a un besoin urgent d’investissements qui préparent l’avenir. Le pacte de
relance impulsé par le Président Hollande est un premier pas, mais nous restons
loin d'un « New Green Deal ». Certes la France a des capacités d’investissement, en supprimant notamment les milliards
d’euros de niches fiscales anti-écologiques ou en réorientant les fonds publics
vers des investissements utiles : des tramways, des crèches, des services
publics plutôt que des infrastructures inutiles, des aéroports ou des missiles
à tête nucléaire… C’est néanmoins à l’échelle européenne que peuvent se
structurer de grands projets d’investissement dans les renouvelables, le
bâtiment ou les transports ;
−
Fédéraliser le budget européen
Il est
impératif de trouver de nouvelles recettes au budget européen qui s'ajoutent
(et non se soustraient) à la participation des États. La taxe sur les
transactions financières est un premier pas significatif mais insuffisant, et
nous demandons donc son élargissement et la mise en place d'une contribution
climat énergie européenne.
Enfin,
nous soutenons la proposition de Mario Monti de sortir les investissements
d’avenir du
calcul
des déficits ;
−
Démocratiser l’Europe
Les
Européens ont le sentiment que l’Europe se fait sans eux ou contre eux. Nous
devons construire une Europe parlementaire, avec une souveraineté partagée
entre les parlements nationaux et le parlement européen. Dans l’immédiat, nous
proposons qu’en amont de chaque Conseil européen, le gouvernement français
présente devant les assemblées les positions qu’il va y défendre. Pour 2014,
les écologistes proposeront que la ou le prochain président de la Commission
européenne soit issu des élections européennes. Ainsi, la Commission
deviendra-t-elle une instance politique comptable devant des représentants
élus.
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